La musique enflamme la berge

Embarqués sur un bateau électrique, le temps d’une mini-croisière sur la Vilaine, 6 festivaliers sous le coup de l’émotion expliquent comment l’expérience musico-fluviale a changé le cours de leur vie.

Ils se sont inscrits pour voir le concert du trio acoustique Güz II. S’imaginant rejoindre un appartement, ils suivent Malo* en toute confiance qui les conduit vers un ponton où flottent paresseusement six petites navettes. On leur remet un gilet de sauvetage orange, certains l’enfilent abasourdis, d’autres, ayant repéré du coin de l’œil la présence de Ganaël* et de son reflex, se méfient d’une carrière ou d’un début d’histoire d’amour réduit en miette à cause d’une vidéo en libre circulation sur les réseaux sociaux.

Une demi-bière plus tard, nous filons tel un hors-bord de contrebande, le visage fouetté par les gerbes d’eau et les yeux plissés par l’embrasement crépusculaire de la Vilaine. Louison, notre pilote, scrute la surface de l’eau pour éviter de percuter les gardons qui se prélassent entre deux eaux après une grosse journée à fouiller la vase.  Nous accostons un ponton sur une île en forme de haricot, là nous attendent les trois musiciens de Güz II. L’apéritif sonore est une joyeuse composition de voix, saxo, violon et banjo, parsemée d’un peu de flûte et de clavier que soutient la boîte à rythme de secours (l’autre est tombé dans l’eau). Standing ovation dans les esquifs. Au retour, noyés d’émotion, les inconnus dans le bateau se regardent et les langues se délient.

« Je vais lancer un nouveau courant » nous confie Elodie « Le rock aquatique », et Kenza de renchérir : « Tu as raison… c’était fort… je ne l’oublierai jamais. Jamais ! ». Lulu hésite, on la sent bouleversée, elle se ressaisit et assène : « Je vais installer ma famille dans une maison au bord d’une rivière ! ». Louison, qui pilote d’une main nonchalante, se redresse et crie : « Et moi passer mon permis bateau ! », Claire l’encourage d’un hochement de tête, elle envisage maintenant d’expérimenter des choses un peu folles à Rennes, dit-elle d’un air mystérieux. Les regards se tournent alors vers Pauline qui n’a encore rien dit. Elle désigne Elodie et Claire : « Pour mon retour à Rennes, mes amies m’ont invité à cette soirée surprise… se sentir aimé comme ça… waouw… ». Silence on the boat. S’ils le pouvaient, les gardons applaudiraient. Je m’empresse de noter ce moment magique dans mon calepin gondolé par l’humidité.

Raoul Kalin

JEU
Saurez-vous identifier sur la photo Kenza, Louison, Lulu, Elodie, Pauline et Claire à partir de leurs citations ?

* Pour protéger l’anonymat de Max et Gilles, les prénoms ont été changés